La partie d'échecs: Dès l’arrivée du 301ème G.A. à Villingen, le détachement américain est venu se mettre en place.
Sa mission était d’assurer la
protection de la partie nucléaire de nos roquettes, tant au dépôt que lors des manœuvres,
ainsi que la mise en œuvre et le montage des têtes, en particulier lors des contrôles.
Ce
détachement fort d’une cinquantaine de membres était commandé par un capitaine. Il
occupait un bâtiment indépendant face au quartier Lyautey. Bâtiment que nous avons tous connu sous le nom de "bâtiment U.S." même longtemps après le départ des américains.
En ces temps, j’étais chef d’une des deux équipes de montage de la SML. Chacune des
équipes était jumelée à une équipe américaine. J’avais comme homologue le sergent
Jewels, géant de presque 2 mètres. Nos rapports étaient excellents.
Certains cadres qui travaillaient en liaison étroite avec les américains, étaient invités
régulièrement dans leur détachement pour des soirées en général bien arrosées.
Il
me souvient que lors d’une de ces soirées, le capitaine du détachement a lancé à la
cantonade : « qui veut faire une partie d’échecs? ». J’ai relevé le gant, et nous voila tous les
deux à manœuvrer nos pièces devant quelques spectateurs amusés. Le colonel Combes,
son verre à la main, s’est approché de moi et m’a dit : « Béna, si tu gagnes tu auras une 48
heures. » Laborieusement j’ai gagné, mais je n’ai pas osé demander ma récompense.
La mort de Kennedy: Le 22 novembre 2013, le monde entier commémorait le 50ème anniversaire de l'assassinat à Dallas de John Fitzgerald Kennedy, 35ème président des Etats-Unis.
Le lendemain de la mort de JFK, le 23 novembre 1963, j’étais de service comme chef du
poste de police du 301° G.A. au quartier Lyautey.
Vers 20 heures la sentinelle en faction à l'entrée du quartier vint me trouver dans un grand état d’excitation pour me rendre compte qu’une masse de civils, brandissant des torches, venant du centre ville, remontait la Kirnacherstraße dans notre direction.
Afin de vérifier l’information et évaluer la situation je me rendis dans la rue. En effet, à une
centaine de mètres une foule silencieuse et compacte de plusieurs centaines de personnes
occupant la totalité de la chaussée, avançait lentement vers nous dans un profond silence,
certains portants une torche.
En quelques instants, cette foule passa devant le portail d’entrée, et quelques mètres plus
loin tournant à gauche pénétra dans la cour du détachement américain et s’arrêta face au
bâtiment. Une délégation est-elle rentrée dans le bâtiment?, je l’ignore. Au bout de quelques
minutes, toujours en silence, les porteurs lancèrent leur torche en formant un brasier au
milieu de la cour. Puis la foule se dispersa par petit groupes reprenant, toujours en silence la
direction du centre ville.
Nous avons été informés le lendemain que cette manifestation a été organisée par la
municipalité de Villingen en hommage au président assassiné.